#7 Zoom Boom Partie 2 : Se refaire le portrait en visio, tendance ou marketing ?

Nous revenons sur un effet secondaire étonnant des visio, les demandes de chirurgie esthétique ! Voyons comment la visio peut impacter le rapport à notre image et les facteurs qui incitent à faire ce pas.

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Transcription

Guillaume : Bonjour à tous et à toutes ! Bienvenue dans ce nouvel épisode de Micro-Ondes Cérébrales, le podcast qui réchauffe vos méninges. Moi c'est Guillaume, et je suis avec Melissa. Salut Melissa !

Melissa : Salut Guillaume !

Guillaume : Aujourd'hui, nous revenons sur le phénomène du Zoom Boom que nous avions déjà évoqué dans notre épisode 5, filez l'écouter d'ailleurs si ce n'est pas déjà fait. 

Cette fois, on va revenir sur un effet secondaire étonnant de l'impact des appels visio, la recrudescence des demandes de chirurgie esthétique. On va essayer de comprendre comment les appels vidéo peuvent impacter notre rapport à notre image, à notre physique et les facteurs en ligne qui peuvent inciter à faire le pas jusqu'à la chirurgie esthétique. On va essayer d'avoir un regard éclairé pour vous dévoiler des facteurs que l'on ne soupçonne pas forcément.

On va revenir sur un effet secondaire étonnant de l'impact des appels visio, la recrudescence des demandes de chirurgie esthétique.

Mais avant de commencer, Mélissa, est ce que tu peux nous rappeler ce qu'est le zoom boom pour les deux ou trois du fond qui n'auraient pas suivi ?

Melissa : Alors oui, le zoom boum, c'est donc cette explosion des appels vidéo qui s'est faite pendant les confinements due à la pandémie COVID 19. Aujourd'hui, les appels vidéo sont toujours très fréquents et bien plus ancrés dans notre vie quotidienne qu'avant la pandémie.

Guillaume : Oui effectivement. Et pour en revenir à notre sujet du jour, on aurait pu penser que grâce à la démocratisation de ces appels vidéo, les utilisateurs et utilisatrices y auraient vu un moment pour être plus à l'aise socialement, pour mieux dissimuler leurs défauts supposés, puisqu'en visio on peut faire le choix de moins voir, voire de ne pas du tout voir nos interlocuteurs et interlocutrices.

On aurait pu penser que grâce à la démocratisation des appels vidéo, les utilisateurs et utilisatrices y auraient vu un moment pour être plus à l'aise socialement.

On peut cacher éventuellement sa taille, son poids, ses problèmes de peau ou capillaires. Et on peut même rester en pyjama toute la journée. Et je parle d'expérience !

Donc comment au contraire peut on faire ce chemin intellectuel en fait, de vouloir plus de chirurgie esthétique si quelque part personne ne nous voit vraiment ?

Melissa : Eh bien en fait, la thèse des appels vidéo sur la recrudescence de ce type d'opérations chirurgicales viendrait à priori de deux facteurs. Tout d'abord, le fait que même si on se montre moins en réel à d'autres, on se voit beaucoup plus soi-même. 

En visio, même si on se montre moins en réel à d'autres, on se voit beaucoup plus soi-même.

Les appels vidéo fournissent notre image en continu, donc c'est un peu comme si on avait un miroir non-stop. Et beaucoup d'entre nous sont encore plus focalisés sur leur image que sur le reste de la vidéo. Donc après tout, bien souvent il ne se passe pas grand chose en visuel, et donc on passe beaucoup de temps à se regarder soi même.

Guillaume : C'est vrai qu'en visio, on peut capter parfois les personnes - faites l'exercice chez vous, vous qui nous écoutez - qui se regardent un peu non-stop avec leur regard qui passe trop de temps dans le coin en bas de leur écran. Faites l'exercice...

Melissa : C'est exactement ça ! Et je dois avouer que ma propre tête me distrait pas mal. Aujourd'hui tendance à carrément enlever ma tête, en fait, en appel.

Guillaume : J'ai fini par le faire également ! Mais donc ok, on est amené à passer plus de temps à se regarder soi même. C'est vrai quand on fait des réglages ou même en cours de visio. J'imagine que pour certains et certaines, à force de se voir, on ne se supporte plus. Qu'est ce qui se passe dans ces cas là ?

Melissa : En fait, c'est plus qu'à force de nous voir, on va se trouver plein de petits défauts. On va voir qu'on a le teint terne, surtout si on ne sort pas beaucoup, comme en confinement. Après, la lumière peut jouer aussi son rôle. On va avoir nos poches sous les yeux, on va voir des rides qu'on ne voit pas ou qu'on n'avait pas forcément repérées avant, quand on ne se voyait que cinq minutes en se brossant les dents le matin. 

À force de se voir en visio, on va finir par se trouver plein de petits défauts.

Et puis après on a un deuxième facteur qui réside dans le confort que représente le fait de rester chez soi, voire de porter un masque lorsqu'on se fait opérer. Puisqu'en fait il y a des inflammations et des cicatrices post-opératoires qui peuvent mieux rester dissimulées au reste de notre environnement social.

Guillaume : Oui, j'imagine effectivement que dans certains cas de figure, la visio, elle permet aussi de, continuer à avoir ce contact social sans être obligé d'être confronté aux face à face quotidiens. 

Bon, ça c'est des hypothèses mais si on met un peu de science dans tout ça, ça donne quoi ?

Melissa : Alors effectivement, on a beaucoup de titres d'articles très sensationnels, comme : "Le zoom boom, le boom des chirurgies plastiques". Ils pullulent sur internet et ailleurs. Mais c'est bien de pouvoir faire un peu de fact checking.

Guillaume : Oui parce que le fait de croire en quelque chose juste parce qu'on voit ça partout, c'est, je vous le donne en mille :  un biais cognitif. On en a déjà parlé dans l'épisode sur les Fake News il me semble ?

Melissa : Oui, c'est ça, c'est le biais d'illusion de vérité. On en reparle tout à l'heure, car même si l'intérêt pour les chirurgies esthétiques a pu augmenter pendant la pandémie, notamment d'après l'augmentation vérifiée démontrée des mots clés cherchés sur Google en rapport avec le sujet à ce moment-là, il faut comprendre qu'on ne peut pas encore parler de lien de cause à effet.

En fait, même si l'intérêt pour les chirurgies esthétiques a pu augmenter pendant la pandémie, on ne peut pas encore parler de lien de cause à effet.

Guillaume : Oui, c'est un peu comme le fait de lier par exemple les ventes de lunettes de soleil aux ventes de glaces dans l'année parce que c'est l'été et qu'il y a du soleil et qu'il y a de la chaleur. Mais bon, jusqu'à preuve du contraire, les lunettes de soleil ne font pas acheter plus de glaces non plus quoi ?

Melissa : Non, même si j'aurais aimé avoir cette excuse pour justifier ma consommation. (rires)

Guillaume : Et oui, mais non. (rires)

Melissa : Donc tu as raison : sur tout ce qui touche à internet ou même à l'actualité en général, il faut faire attention à la différence entre une corrélation, c'est à dire deux observations qui peuvent par exemple avoir lieu au même moment, et le fait qu'une observation est la cause ou la conséquence de la deuxième.

Sur internet comme ailleurs, il faut faire attention à la différence entre une corrélation et des observations simultanées sans liens particuliers.

Guillaume : Alors comment tirer le vrai du faux dans ces cas-là ? Comment savoir si ce lien est peut-être un peu exagéré ou pas ?

Melissa : L'une des premières choses à faire si ce n'est qu'une corrélation, c'est de voir s'il y a d'autres facteurs qui pourraient aussi contribuer à un intérêt plus grand. Ici en l'occurrence, pour la chirurgie esthétique pendant la pandémie. 

Tout à l'heure, on a pu voir que déjà à la sortie d'une opération, le fait de rester à distance peut être plus pratique pour les patients. Et donc ça par exemple, c'est déjà un facteur qui est différent de simplement faire un appel vidéo. 

Il a été démontré que le moral joue un rôle déterminant dans l'acceptation de son apparence et de son corps au sens large. Et les chiffres sont clairs sur la période de la pandémie : le moral évidement était très bas.

On a aussi un autre facteur qui lui a été démontré, c'est le fait que le moral joue un rôle déterminant dans l'acceptation de son apparence et de son corps au sens large. Donc les chiffres sont clairs sur la période de la pandémie et un moral dans les chaussettes. Ou bien même la forte augmentation des demandes de consultations en santé mentale a été très remarquée et a pu être chiffrée dans plusieurs pays. Ça c'est réel.

Donc finalement, appels vidéo ou non, il est probable que la période difficile qu'a représentée la pandémie pour beaucoup ait amené certains d'entre nous à moins accepter notre corps et notre image.

Finalement, visio ou pas, il est probable que la période difficile qu'a représenté la pandémie ait amené certain.e.s d'entre nous à moins accepter notre image.

Donc on a déjà d'autres facteurs qui permettent de remettre en cause ce lien de causalité à effet qui a été un peu relayé par une presse qu'on va donc pouvoir qualifier de peu consciencieuse.

Guillaume : Au-delà de la presse, on doit aussi avoir pas mal d'influenceurs et d'influenceuses qui, de manière explicite ou non, font la promotion de la chirurgie esthétique j'imagine ?

Melissa : Oui, c'est vrai. On a donc les influenceurs influenceuses qui participent probablement à une banalisation de certaines de ces procédures, ou même parfois de la promotion plus explicite. 

Mais on a aussi quelque chose dont on parle peu, c'est le lobby des chirurgiens esthétiques parfois d'ailleurs, associé à des influenceurs qui d'une certaine manière sévit dans l'ombre sur les réseaux sociaux.

Il y a aussi un phénomène dont on parle peu, c'est le lobby des chirurgiens esthétiques sur les réseaux sociaux.

Guillaume : Tu veux dire qu'il y a des médecins qui font la promotion de leur cabinet de chirurgie esthétique en ligne ? Ça paraît fou.

Melissa : Ça paraît fou parce que nous, avec notre culture de médecine plutôt française, on a des barrières éthiques et morales qu'on n'imagine pas pouvoir être franchies aussi facilement dans d'autres pays. 

Mais par exemple, aux Etats-Unis déjà, on ne parle pas de patients, on parle de clients. Et les chirurgiens plastiques peuvent se former en stratégie de marketing digital. Donc on a des articles scientifiques qui circulent pour justement mieux savoir comment établir ce type de stratégie de marketing digital. On leur apprend notamment à dépasser les photos du style "Avant vs. Après", parce que ça, c'est devenu ringard. On leur parle plutôt de faire des vidéos puisque les plateformes le permettent, et que ça permet d'avoir plus de visibilité, et aux utilisateurs de prêter une meilleure attention.

Aux Etats-Unis ou déjà on ne parle pas de patients mais de clients, les chirurgiens plastiques peuvent se former en stratégie de marketing digital.

On propose aussi à ces chirurgiens de se coopter entre eux, parce qu'en fait, peu importe où ils ont fait leur internat, même sans venir d'une fac de médecine ultra prestigieuse, ils peuvent s'offrir le prestige entre chirurgiens à force de voir les chirurgiens ensemble s'offrir des compliments, se congratuler entre eux. 

Car si on voit des chirurgiens répéter qu'ils sont bons, c'est encore ce biais d'illusion de vérité qui va agir. Et donc on s'imagine que évidemment ils sont super bons. Donc c'est vraiment un véritable lobby organisé dont on parle peu mais qui existe réellement.

Guillaume : Oui effectivement je m'attendais pas à ça ! En tout cas, la morale aujourd'hui, c'est qu'il est un peu facile de jeter la pierre à une technologie, mais c'est encore plus facile de vérifier l'effet sensationnel qu'on peut vite prendre pour des vérités, donc faut surtout pas hésiter à le faire.

Melissa : Oui, tout à fait. On peut accorder une corrélation et envisager des risques, mais encore faut-il s'assurer d'une relation de cause à effet entre appel vidéo et chirurgie esthétique dans le cas d'aujourd'hui. 

Donc d'ici là, un conseil : si déjà vous pouvez enlever votre votre tête ou votre propre vidéo - on peut le faire très facilement sur les services de visio - faites-le ! Vous serez moins distrait, et plus dans la conversation que sur la traque à la ridule. 

Attention au biais d'illusion de vérité, répéter une idée ne la rend pas vraie sans vérification.

Ensuite, bien entendu, attention au biais d'illusion de vérité. Répéter une idée ne la rend pas vraie sans vérification. Cherchez aussi d'autres facteurs possibles, quand on affirme des liens de cause à effet de manière trop simple. Car, concernant la chirurgie esthétique, il y a beaucoup d'argent en jeu, donc beaucoup de stratégies qui se mettent en place pour en profiter.

Guillaume : Oui, puis avant d'user du bistouri, n'hésitez pas à faire votre Valérie Damidot de la visio en aménageant le cadre de votre webcam pour y mettre quelques plantes, des jolies lumières ou une bibliothèque pleine de livres savants, ça vous mettra tout de suite plus en valeur et sans passer par la case clinique. Il y a même des professionnels qui aujourd'hui vous proposent de le faire pour vous !

Avant d'user du bistouri, n'hésitez pas à faire votre Valérie Damidot de la visio !

Au-delà de la blague, effectivement, il y a des manières facilement activables de déjà faire en sorte que vous aimiez un peu plus le cadre qui constitue votre webcam au-delà effectivement d’un nez ou de rides un peu trop présentes, mais qui sont effectivement… l'apanage de la nature ?

Melissa : Oui, il y a plein de choses à disponibilités pour pallier à ce type d'angoisse, donc tant mieux. Pour résumer, le Zoom Boum et le boom de la chirurgie esthétique sont peut-être observés tous les deux en 2021/2022 mais leur aspect synchrone ne suffit pas à faire en sorte que l'un explique l'autre ou que l'un cause l'autre. 

Avec aussi peu de rigueur, on pourrait même dire l'inverse, c'est à dire on pourrait dire la chirurgie esthétique augmente les appels vidéo, on voit bien qu'il faut faire attention. 

Pour résumer, si le Zoom Boum et le boom de la chirurgie esthétique peuvent être observés tous les deux en 2021/2022, leur aspect synchrone ne suffit pas à faire en sorte que l'un explique l'autre. 

Donc même si des liens font les gros titres, attention aux biais de fausse corrélation et attention aux biais d'illusion de vérité, d'autres facteurs moins glamour peuvent exister.

Guillaume : Merci Mélissa pour toutes ces informations sur le Zoom Boom et ses conséquences avérées ou pas. N'hésitez pas encore une fois à écouter la première partie de ce sujet, consacrée à l'explosion de nos appels vidéo.  On revenait donc entièrement sur cette partie-là dans la partie 1. 

C'est la fin de ce nouvel épisode de Micro-ondes Cérébrales, on espère qu'il vous aura plu, n'hésitez pas à le partager sur vos réseaux Twitter, Instagram où nous sommes présent également. 

N'hésitez pas non plus à lui mettre les 5 petites étoiles et un commentaire, Apple Podcast et Spotify le permettent, et c'est vraiment une chouette manière de nous soutenir. 

Et n'oubliez pas que vous pouvez nous laisser vos messages sur ce sujet mais aussi sur tous les autres avec notre répondeur en description de ce podcast.

Nous on se retrouve en tout cas dans deux semaines pour un nouvel épisode. 

Merci Mélissa, Bye !

Melissa : Bye Guillaume, salut tout le monde !

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